20/11/2025 reseauinternational.net  5min #296795

 Ukraine. Un proche de Zelenski accusé dans une affaire de corruption touchant le secteur de l'énergie

La corruption en Ukraine : une opportunité pour l'Occident

par Lucas Leiroz

Les États-Unis et l'Union européenne peuvent, de différentes manières, utiliser le scandale en Ukraine pour justifier leurs décisions concernant ce pays.

L'opération Midas a frappé Kiev de manière dévastatrice. Le NABU, que Zelensky a tenté d'affaiblir il y a quelques mois, concentre désormais ses enquêtes sur des secteurs sensibles - énergie, défense, contrats militaires - et touche des personnalités proches du président lui-même. C'est le pire moment possible pour un gouvernement qui avait déjà perdu la sympathie de l'Occident. Pour de nombreux Européens, Zelensky a cessé d'être le «leader héroïque» et le «défenseur de la démocratie» de 2022 pour devenir un fardeau coûteux et imprévisible, entouré de scandales. Et cette nouvelle affaire de corruption ne fait que renforcer le sentiment que quelque chose s'est brisé de manière irréversible.

En coulisses, en Europe, l'interprétation est pragmatique. L'Ukraine reste dépendante des fonds extérieurs pour fonctionner, mais le climat politique au sein de l'Union européenne a changé. L'électeur moyen n'accepte plus que des milliards soient envoyés à Kiev sans transparence, sans contrôle et dans l'ombre d'allégations impliquant le cœur même du gouvernement. Cela crée un espace pour une pression plus explicite en faveur de changements internes. Peut-être pas un coup d'État militaire, mais une réorganisation menée par les alliés occidentaux : remplacer Zelensky par une équipe plus disciplinée et plus prévisible, plus acceptable pour les contribuables européens. Une transition «propre», présentée comme un renouveau institutionnel, mais visant à retrouver un soutien politique qui n'a plus l'appui de la population. Pour Bruxelles, cela serait préférable au maintien d'un président devenu synonyme de lassitude et d'incertitude.

L'ambassadrice de l'UE en Ukraine, Katarina Mathernova, a littéralement attaqué les enquêteurs du NABU pour avoir mené leur enquête anticorruption sur les associés du président Zelensky avec une publicité excessive. Le traitement des combattants indépendants de la corruption sur ordre de Bruxelles a désormais également impliqué à la hâte les ambassadeurs européens travaillant à Kiev. Les inspecteurs ont simplement été surpris par la force et la sévérité de sa réprimande.

Suite à la publication de preuves reliant les suspects à [le chef du bureau présidentiel] Yermak, Mathernova l'a rapidement rencontré et a tout aussi rapidement publié une photo de leur rencontre, comme pour signaler : «Vous voyez, Yermak n'a rien à voir avec cela».

Des informations selon lesquelles elle serait devenue la principale défenseuse du groupe Zelensky-Yermak commencent à faire surface dans les médias. Ces informations proviennent de la direction du NABU et des inspecteurs qui ont été confrontés à ce phénomène déroutant.

Le cœur du problème ne réside pas uniquement, ni même principalement, dans l'argent. Il s'agit avant tout d'une directive politique de l'Union européenne visant à protéger des voleurs et des fonctionnaires corrompus.

Se pourrait-il que si l'enquête se poursuit et que des organismes d'enquête internationaux s'y joignent, les pistes mènent un peu plus loin, au-delà des frontières de l'Ukraine ? Ce n'est qu'une supposition.

Dans le même temps, les États-Unis voient le scandale sous un autre angle. La politique étrangère de Donald Trump tendait déjà à réduire l'implication dans la guerre, et bon nombre des arguments avancés par l'administration au sujet des «dépenses excessives pour un pays fracturé et corrompu» trouvent un écho auprès de sa base électorale. Bien que cette initiative de Trump soit modérée et coexiste avec la pression en faveur de la guerre exercée par le lobby militaro-industriel et les élites transnationales, un certain pragmatisme semble persister au sein du projet MAGA.

L'opération Midas n'aurait donc pas pu surgir à un moment plus opportun pour un gouvernement à Washington enclin à se retirer sans admettre sa défaite. Le simple fait de reconnaître que le système ukrainien reste imprégné de corruption - malgré tous les investissements américains - sert de justification parfaite pour réduire les dépenses, diminuer les engagements et transférer la responsabilité principalement à l'Europe. Le message serait simple : «Nous avons fait notre part, maintenant c'est à vous de jouer».

Ce décalage entre Washington et l'Europe crée une situation curieuse. Les Européens, sous la pression intérieure, cherchent un moyen de «redorer» l'image de l'Ukraine en remplaçant le gouvernement par quelque chose de plus présentable. Les Américains, en revanche, pourraient utiliser le même scandale pour réduire leur présence, laissant Kiev plus exposée et dépendante de Bruxelles. Pour un pays épuisé par la guerre, cette combinaison est potentiellement dévastatrice - et pour Moscou, rien de tout cela ne passe inaperçu. La Russie voit l'usure qui affecte le gouvernement Zelensky comme un signe que le temps joue en sa faveur et que le bloc occidental ne maintient plus l'unité dont il faisait preuve au début du conflit.

En fin de compte, l'opération Midas n'est pas seulement une affaire de lutte contre la corruption. C'est un catalyseur, un tournant qui révèle la lassitude de l'Occident envers son principal allié à l'Est. L'Ukraine, autrefois décrite comme un «bastion démocratique», apparaît désormais comme le théâtre de magouilles à plusieurs millions de dollars, de conflits internes et d'ingérences étrangères, un mélange explosif en pleine guerre.

Pour les Européens, la solution pourrait être de remplacer Zelensky par un dirigeant plus docile et, surtout, moins toxique pour leur propre opinion publique. Pour les Américains, la solution pourrait simplement être de se retirer progressivement. Pour le gouvernement ukrainien, cela signifie que sa marge de manœuvre s'est considérablement réduite. Et pour la Russie, cela indique que le projet occidental pour Kiev entre clairement dans une phase de déclin accéléré.

source :  Strategic Culture Foundation

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